Speedgoat 50, Utah

J'ai souvent dit que je voulais ma revanche au Knee Knacker. Je l'ai dans la gorge, cette course, coincée dans le gosier. Ce que je prévoyais être la plus longue course de ma vie s'est transformée en un interminable calvaire. J'ai passé les dernières deux heures sur les sentiers à me dire qu'en 2013, ce serait une autre histoire. Et je me le suis répété souvent depuis...

Profil d'élévation, Speedgoat 50

Une publication d'Ellie Greenwood sur Facebook a fait chamboulé le plan, encore une fois. La fierté de North Vancouver s'est inscrite à Speedgoat 50 et en faisait part à ses fans. La course est bien connue, notamment parce qu'elle est organisée par le légendaire Karl Meltzer et qu'elle attire la crème de la course en sentiers. L'an passé, Kilian Jornet, Rickey Gates, Max King et Anton Krupicka prenaient respectivement les 4 premières positions, et Jason Loutitt, de Squamish, terminait 9e. Cette année, Gates, King et Krupicka croiseront encore une fois le fer, et Sage Canaday, un des meilleurs coureurs américains, sera aussi de la partie.

Krupicka, Koerner, Meltzer, Jurek

Par curiosité, j'ai jeté un oeil sur le site de Meltzer. Le gars a remporté 35 "hundred milers" en carrière, un record. Je me dis : "Avec Meltzer comme directeur de course, et l'élite sur la ligne de départ, aucune chance que je puisse y participer." Erreur. Wrong. Falso. Il reste 52 places. Et là le hamster qui me sert de cerveau pourrait produire de l'électricité tellement ça spine là-dedans! Meltzer, Krupicka, King? Utah? 11 000 pieds d'élévation? Altitude? Sounds like fun! Je ne fais ni une ni deux, j'écris à ma coach, deux fois, pour être certain qu'elle comprenne bien. Après le 2e courriel, elle me répond qu'il y a des trucs qui pourraient m'embêter, entre autres le fait que ça monte jusqu'à 11 000 pieds et que je m'entraîne au niveau de la mer, et qu'il y a autant de downhill que de montée, et que j'ai mal au pied gauche depuis bientôt un an. Mais elle ajoute que j'ai l'air tellement enthousiaste que, bon, pourquoi pas? Enthousiaste, tu dis? Un veau au printemps (on se souvient que j'ai grandi en campagne, d'ac?)!

Une fois l'adrénaline redescendue à un niveau dit normal, je réfléchis plus longuement. Certes, c'est un défi de taille en raison de la technicalité du terrain et de l'altitude. La logistique aussi. Je n'ai présentement pas d'emploi stable, et idéalement, j'aimerais me pointer en Utah une semaine à l'avance, question d'adaptation au climat et aux montagnes. Aurais-je le temps et l'argent pour m'y rendre?

Lendemain matin, il reste 36 places. Ok, faut que je me décide. Je vois plus les inconvénients que les avantages et me dis que finalement, le Knee Knacker, c'est pas une si mauvaise idée. Mais quand même, ça me ronge...

Deux jours plus tard, 15 places. Je travaille avec Peter et j'y pense. J'attends la réponse pour un emploi de traducteur. On devait m'écrire la veille. J'ai relancé le gars, je suis fatigué d'attendre. Le verdict tombe : "Nous avons reçu plusieurs candidatures exceptionnelles..." Quand ça commence comme ça, ça veut dire que ta candidature exceptionnelle était moins exceptionnelle qu'une autre candidature exceptionnelle. Et je suis assis à la table avec Peter, et il voit bien qu'il y a quelque chose qui cloche. Je lui dis pour l'emploi. Et pour Speedgoat. Il me dit :

-C'est quoi le problème?
-Ben, euh, l'altitude, l'argent, la distance...
-Vas-y.
-Tu penses...
-Vas-y.
-Si tu le dis...

Parfois, je suis comme un chiot, faut juste qu'on me gratte sur la tête. Ou qu'on me donne un coup de pied dans le cul.

See ya in Utah, runners!


Ben